Ce que m’a appris un comité de direction sur le pouvoir des non-dits


Lors d’une mission récente, j’ai accompagné un comité de direction dont les résultats stagnaient. Sur le papier, tout allait bien : des dirigeants compétents, des équipes engagées, des KPI suivis avec rigueur, des réunions parfaitement structurées.

Et pourtant… quelque chose freinait l’élan collectif. Une force invisible. Un poids silencieux.

Ce « quelque chose », c’était le non-dit.

Le non-dit : l’ombre dans la conversation

Un non-dit, c’est une ombre dans une conversation. Un silence lourd dans une symphonie de mots.

C’est ce que l’on choisit de ne pas exprimer, par peur, par embarras, par stratégie ou simplement pour éviter le conflit. Comme un iceberg, la partie visible – les mots prononcés, les décisions affichées – ne révèle qu’une fraction de la réalité. Sous la surface, cachée aux regards, se trouve une masse énorme de silences, de tensions, d’opinions refoulées.

Et cette masse invisible agit. Toujours.

Quand le silence pèse plus que les mots

Dans ce comité de direction, les non-dits étaient partout :

  • Des désaccords masqués par des sourires polis,

  • Des décisions contestées intérieurement mais jamais confrontées,

  • Des frustrations tues par peur de créer des vagues.

En apparence, tout roulait. En profondeur, une énergie immense se perdait à éviter les sujets sensibles.

Car le non-dit a un coût. Il freine la prise de décision, mine la confiance, dilue la clarté stratégique.

Les racines invisibles des non-dits

Pourquoi choisit-on de se taire ? La psychologie humaine nous éclaire :

  • La peur : peur du jugement, de l’échec, de la confrontation, de blesser l’autre.

  • Le manque de confiance : douter de la validité de ses idées ou craindre qu’elles ne soient pas entendues.

  • Les dynamiques relationnelles : dans un rapport de pouvoir déséquilibré, le silence peut devenir un mode de survie.

  • La culture et l’éducation : certaines cultures ou familles valorisent la retenue et découragent l’expression émotionnelle.

Ces silences, accumulés, deviennent comme des couches de vernis qui finissent par masquer la véritable image de la relation – qu’elle soit professionnelle ou personnelle.

Le non-dit : arme ou poison

Parfois, le non-dit est utilisé comme un outil stratégique. Dans une négociation, il peut maintenir un rapport de force. Dans un comité, il peut éviter une explosion de conflit.

Mais c’est une arme à double tranchant : à court terme, il maintient la paix ; à long terme, il engendre méfiance, malentendus et frustration.

Dans le cas de ce comité, il étouffait peu à peu la dynamique collective.

Mettre en lumière l’invisible

Le déclic est venu le jour où j’ai proposé un espace de parole sécurisé, où chacun pouvait exprimer ce qui était tu.

Au début : des silences pesants, des regards fuyants, des phrases avortées. Puis, peu à peu, une première vérité a émergé. Puis une autre. Et encore une autre.

Ce qui avait été longtemps enfoui trouvait enfin un chemin vers la lumière.

Et une chose s’est produite : le collectif s’est libéré.

Les non-dits se sont transformés en échanges authentiques, en confrontations constructives. Les tensions, une fois exprimées, sont devenues des leviers de clarté.

L’art de décoder les non-dits

Apprendre à repérer et à accueillir les non-dits est une compétence clé pour tout dirigeant. Quelques pistes :

  • Observer le langage corporel : un sourire forcé, un regard qui fuit, un soupir.

  • Repérer les contradictions entre les mots et les attitudes.

  • Poser des questions ouvertes : « J’ai l’impression qu’il y a quelque chose de plus, veux-tu en parler ? »

  • Créer un cadre sécurisant et non-jugeant.

  • Pratiquer l’écoute active : parfois, le simple fait d’être présent suffit pour que l’autre ose se livrer.

  • Développer l’empathie : chercher à comprendre pourquoi l’autre choisit de taire certaines choses.

La leçon d’un comité de direction

Ce comité m’a appris une chose essentielle : ce que l’on tait agit malgré nous.

Les non-dits ne disparaissent pas. Ils s’infiltrent dans les décisions, dans les relations, dans la culture de l’organisation.

Mais lorsqu’ils sont mis en lumière, ils cessent d’être des freins pour devenir des leviers. C’est alors qu’un collectif peut réellement s’aligner, décider avec clarté et avancer avec confiance.

Et vous, dirigeants ?

Dans vos comités de direction, vos équipes ou même vos relations personnelles :

Quels sont les non-dits qui, aujourd’hui, freinent votre performance collective et votre alignement ?

Car la vraie force d’un leader n’est pas d’éviter les tensions… mais de créer l’espace où elles peuvent être exprimées, entendues et transformées.


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